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    Il faut que j’offre un peu de muguet pour ce premier mai.

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    Mais je ne sais pas à qui en offrir parce que je n’aime personne, moi. Les gens sont des égoïstes, qui se moquent pas mal de moi. Est-ce que l’on m’en offre, du muguet ? Non. Eh ben, alors ? Pourquoi offrirais-je du muguet à des gens qui ne m’en offrent pas ?

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    Je n’aime pas souhaiter le bonheur aux gens.

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    Les gens sont bien assez heureux comme ça. En plus, ils ne le savent pas, mais moi, rien qu’à les regarder, je sais qu’ils sont inaptes au bonheur. Alors autant les ménager, et ménager mon portefeuille par la même occasion. Parce que vous avez vu le prix du muguet, cette année ? C’est une arnaque. Je soupçonne les trafiquants de drogue en train de mettre en place leur reconversion officielle. Il ne faut pas exagérer : c’est plus cher qu’un bulletin de loto et ça ne peut absolument pas vous rapporter gros. Quoi ? Vous croyez que ça peut vous porter chance, un petit bouquet de trois fleurs qui ne tiennent même pas une semaine ? Ah, ah ! Laissez-moi rire ! Laissez-moi me gausser ! Le muguet ne porte chance qu’à ceux qui s’en mettent plein les poches et les manches ! Il ne faut pas me raconter de salades : l’année dernière, ma voisine a reçu un bouquet de muguet anonyme. Résultat : elle est décédée dans la semaine. Coup du sort, vous allez dire ? Non : coup de fusil ! Son mari, jaloux comme un pou, n’a sans doute pas beaucoup apprécié que l’on offre un porte-bonheur à sa femme et pas à lui.

    Ma femme leur avait d’ailleurs envoyé une carte de vœux en début d’année. Bonne santé, meilleurs vœux, tous nos vœux de bonheur et de réussite et tutti quanti ! On voit le résultat : pour elle, c’est fini, et pour lui aussi, si l’on peut dire, parce qu’il est désormais en prison et pas prêt d’en sortir.

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    Vous parlez d’une réussite !

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    Et puis, c’est quoi, un porte-bonheur ? Un truc qui va vous rapporter plein d’argent ?

    L’argent, quand il y en a trop, c’est pas bon. Mon oncle est devenu fou, à cause de l’argent. Il passait son temps à vérifier et pointer ses comptes, à recommencer, à recalculer, à suspecter les banquiers de lui en détourner, sa femme de lui en piquer, et ses amis d’être intéressés.

    Il a chopé une infection au bout des doigts à force de palper les billets, et ça c’est transformé en gangrène. La gangrène de l’oncle Picsou, qu’ils ont appelé, ça, les spécialistes. Une gangrène qui te cloue au sol, qui te bouffe les doigts, et qui s’attaque aux bronches. Bizarre, le truc, mais vraiment pas beau à voir.

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    Boh, boh !

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    C’est pour ça : moi, le muguet, je n’y crois pas. C’est de la convention collective, tout ça. Du règlement social à la con !

    Moi, le premier mai, je reste chez moi et je ne sors pas de la maison. Pas de dépense et pas de faux-semblants.

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    En plus, le premier mai, c’est la fête du travail : le seul jour de l’année où il est interdit de travailler. Alors pourquoi sont-ils si nombreux à vouloir vendre du muguet, tous ces gens ?

    Qu’on les arrête ! Qu’on les mette en prison ! Qu’on leur fasse bouffer, leur muguet, et qu’ils arrêtent de nous harceler, bon sang !

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    Moi, je vais lancer une nouvelle mode qui ne me coûtera pas cher : le deux mai, ce sera la fête des caractériels ! Tout le monde s’offrira des pissenlits en se souhaitant des méchancetés. On se déballera des horreurs vieilles de dix mille ans, que même les articles de journaux les plus objectifs ne se rappellent pas, et tout ça sans y réfléchir, comme quand on est en colère ! Ce sera le jour de la connerie autorisée, le jour de la dictature appliquée : on se parlera comme des chiffonniers, et on aura même l’autorisation de s’énerver ou de se cogner.

    Le lendemain, on fera mine de faire la paix, pour repartir de bon pied.

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    Comme ça, il n’y aura pas de surprise.

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    Ceux qui passeront l’année sauront qu’au fond, toutes les horreurs qu’on leur aura souhaitées n’étaient pas aussi sincères qu’elles le paraissaient.

    Pour les autres : ils auront eu la chance de pouvoir débusquer leurs véritables bourreaux.

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