Sur ebay, ce qui est génial, c’est qu’on y trouve de tout. Moi, par exemple, je m’y suis rendu pour y acheter ma femme.

Il faut dire que je suis un prédateur extrêmement timide, que j’ai le plus grand mal à aborder le poisson, et que l’exercice devient tout bonnement impossible lorsqu’il s’agit de le faire tomber dans mon filet. L’espèce convoitée, appelée plus couramment la « femme », faisant partie de cette catégorie de poisson sans écailles ni branchies, j’en suis d’autant plus méfiant.

Et si les sirènes ont la réputation d’être plutôt facile à faire crier, les femmes, munies de jambes, ont, elles, plutôt la réputation de nous faire courir.

Un ami que je connais bien m’a déjà d’ailleurs fait part de sa grande expérience, en m’avertissant que les femmes, quand tu ne cours pas après, c’est elles qui te courent derrière, et même qu’il y en a avec les dents bien longues et le porte-monnaie bien vide, et si tu ne te sauve pas pendant qu’il en est encore temps, tu t’exposes alors à de bien terribles déconvenues.

— Ah bon ? j’avais demandé, attisé par la curiosité. Le poisson est-il dangereux ?

— Les femmes ne sont pas plus des sardines que les hommes sont des maquereaux, m’avait-il répondu. Si tu crois que l’art et la manière de séduire une femme s’apparente à une vulgaire pêche en eaux troubles, tu te trompes ! Une femme n’est ni plus ni moins qu’un simple gibier sauvage, et si certaines femmes ont la réputation d’être des croqueuses d’hommes, d’autres, encore bien plus sournoises, ont la particularité de véhiculer les virus les plus hostiles à ton égard, et ce, à l’insu de ton plein pied !

Armé de cet avertissement bienveillant, gonflé à bloc d’une nouvelle vigilance bien plus qu’opérationnelle, ce fut avec un soulagement impossible à contenir, que je découvrais, dans la fameuse section « ventes privées » d’ebay, la catégorie tant convoitée des « femmes à vendre », dont le slogan, efficace et fin comme du gros sel disait « Mise à prix au plus bas pour une chère et tendre qui vous fera bander au plus haut ! » et c’est l’œil coquin et le visage illuminé par la jouissance précoce que, soudain, je me surpris à cliquer compulsivement cinq fois de suite sur l’ACHETER du même produit, non sans avoir préalablement essuyé, il faut le dire, de nombreuses effluves de baves diverses, au fur et à mesure de mon exploration comparative et approfondie du petit millier de produits qui se présentaient à mes yeux, tous plus alléchants les uns que les autres.

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C’est au fil des pages, et surtout au fur et à mesure de mes enchères perdues, que j’ai surtout appris que le produit parfait est rare, et qu’il ne faut pas hésiter à miser beaucoup pour l’obtenir. Grâce aux options « la voir plus déshabillée » ou encore « l’entendre parler », j’aurai bien évidemment évité de belles arnaques, mais grâce à l’option « certifiée conforme à la description » et à la mention « essayé et approuvé par les meilleurs professionnels de notre comité d’experts », j’ai fini par remporter le gros lot « gros lolos » à cause duquel l’explosion de mon plafond de découvert bancaire m’aura au moins fait connaître l’immense fierté d’appeler successivement ma mère, mon père, mes frères et mes sœurs pour leur déclamer l’immense miracle de l’année : « J’AI RENCONTRE L’AME SŒUR ET JE VAIS DONC BIENTÔT ME FAIRE DEPUCELER ! »<o:p></o:p>

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Cependant, la suite des événements ne se déroula pas franchement aussi bien que ce qui était stipulé dans le contrat de commande …

[la suite : une âme soeur nommée Désir...]

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