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La magie de la saint Valentin
Par
charliebregman dans
1- Mon cocon d'avant le
15 Février 2008 à 19:11
La saint Valentin est une fête commerciale. Elle n’a pas d’autre vocation que de :
- faire dépenser leurs tunes à tous les amoureux qui veulent vivre d’amour et d’eau fraîche
- pousser les célibataires désespéré(e)s à se pendre
- pousser les membres des vieux couples à pendre leur conjoint(e)
La preuve :
Il est dix-neuf heures. La journée a été rude et longue (du calme, les filles, je parle de la journée), la route a été pénible, j’ai failli me faire emboutir par des illuminés du sentiment ressuscité au moins une dizaine de fois, bref, je rentre du travail complètement fourbu, éreinté, crevé, etc., et je vous épargne les détails qui ne feraient que vous transmettre mon manque dramatique d’enthousiasme !
J’arrive devant chez moi et dois aller me garer à Perpète-les-Bains à cause de l’autre gugusse de voisin qui gare ses bagnoles n’importe comment en monopolisant quatre places de parking à lui tout seul, me heurte à une porte d’entrée fermée de l’intérieur avec les clefs restées dans la serrure, gong gong gong, c’est moi, est-ce que c’est possible de me laisser enter chez moi, et là, aussitôt, trois femmes me noient littéralement d’un flot ininterrompu de syllabes entremêlées et incongrues, dont je ne posséderai jamais le code de déchiffrage :
— Pitchounette, elle a pas été sage ! Moi, je suis sage ! Mais un petit peu pas sage quand même…
— Il est temps que tu rentres ! Ouf ! Je n’en peux plus ! Je ne sais pas ce que j’ai fait au bon dieu pour avoir des gamines aussi chiantes !
— Cacou ! Caquin ! Na na ? Na na na !
— Maman, elle a confisqué les feutres et les jouets et pis Cendrillon ! Moi, j’ai boudé et pis j’ai pas mangé les épinards, j’avais pas faim, un petit peu quand même mais j’ai mangé les carottes et Pitchounette, elle a pas mangé les carottes !
— Mais si, elle a mangé les carottes !
— Cacou ! Cacou cacou !
— Elle a mangé les carottes mais elle a pas fini quand même, alors Maman, elle l’a mis dans le parc et comme elle a moinné, elle est allée dans le lit pour faire la sieste…
— J’ai voulu en profiter pour dormir un peu, mais j’ai eu ta mère au téléphone…
— Ah ! On a acheté quelque chose ! On a acheté des îles flottantes ! Hum ! C’est bon ça, hein ? Ça te fait plaisir ? Cacou ? Na na na ! Privée de dessert ! Ton père, il est rentré à huit heures passé, hier soir ! A l’école, Papa, Isidore, il a tapé Bernadette ! Caquin ! Mouin, mouin ! Trop cher, mais heureusement, il y a eu une erreur à la caisse, et, na na ? HEEEEE !
Tout se mélange, comme une symphonie incontrôlée de notes dissonantes destinées à me finir ma journée dans l’apothéose du calvaire !
— Hé ! Tu m’écoutes, Papa ?
— Quoi, Bichounette ?
— Tu m’écoutes, ou tu m’écoutes pas ? Parce que si tu m’écoutes pas, moi, je ne suis pas contente, alors je boude et…
— STOP ! Point break, pause, halte qui va là, haut les mains, plus personne ne bouge et on reprend tout depuis le début ! je m’exclame. Déjà : BON-JOUR !
Deux fois deux bises, bisou chérie, bisou mon amour, et na na cacou ouin ouin qui commence à s’énerver parce que personne ne la sort du parc, alors j’enlève mes chaussures, mon blouson, vide mes poches, enfile les pantouffles et :
— Coucou mon amour ! Comment ça va, ma petite puce ? Tu fais bisou ?
Miam. Elle est un peu morveuse à cause de son rhume, mais au moins, elle me fait la bise, c’est fabuleux ! Qu’est-ce qu’elle a le sourire victorieux, cette Pitchounette, quand elle est dans les bras de son papa ! Immédiatement, elle donne des coups de reins et tend le bras vers une poupée russe enfin rendue accessible par l’intermédiaire de son pauvre père…
— Toujours intéressée, à ce que je vois ! je plaisante. C’est pas très cool, ça ! Tu fais bisou, à Papa ?
Miam. Deuxième couche. C’est ti pas fabuleux, ça ?!
La saint Valentin, ça pourrait être exactement ça. Tout l’amour du monde contenu dans quatre petites têtes qui se retrouvent les unes contre les autres, avec moi qui dit, hep hep hep, attendez, j’ai une surprise dans le sac, Bichounette, viens voir là (c’est un cadeau pour moi, papa ?), il y en a pour tout le monde :
— Un pour Bichounette ! Tiens…
Une jolie boîte transparente en forme de cœur, avec les premières fraises d’Espagne enfermées dedans.
— Oh, merci papa !
— Un pour Pitchounette…
Rebelote.
— Tiens Pitchounette ! C’est des fraises ! Miam miam ! Tu aimes bien, les fraises ! C’est bon, ça, hein ? En fait, il y a une boîte pour moi, et une pour toi, mais si tu manges pas tout, tu pourras m’en donner, t’inquiète pas !
— Et ça, c’est pour Maman ! Tu lui dis « tiens, c’est de la part de Papa, bonne saint Valentin ! »
Je lui chuchote à l’oreille :
— C’est un appareil pour faire fondre le chocolat et pour manger avec des fruits et des crêpes !
— Tiens Maman ! C’est Papa qui fait ! Bon anniversaire !
La saint Valentin, ça pourrait être exactement comme ça.
Sauf que ça, c’était hier. Parce que moi, la saint Valentin, je la fête quand j’ai envie, et c’est pas une date sur le calendrier et des rappels toutes les deux minutes à la radio qui vont m’imposer le cœur en artifice à cette date-là plutôt qu’à une autre !
Donc, aujourd’hui, c’est le 14 février 2008.
Charlie Bregman a deux ans. Bon anniversaire Charlie et merci à vous, humbles visiteurs anonymes qui ne laissez jamais la moindre trace et laissez toujours tout comme vous l’avez trouvé !
Je pousse la porte de chez moi, et l’accueil est légèrement différent…
(à suivre…)
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