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    Il était colérique, l’adjudant. Il se mettait dans tous ses états, quand nous recevions un général. Il ne fallait pas se tromper dans le nombre de doses de café dans la machine, ne pas oublier les petits sucres et les croissants, et ne pas faire la moindre rature dans le livre d’or du Régiment. Il ne fallait pas oublier de lui arroser ses plantes non plus. Il détestait cela, que l’on ne s’occupe pas de ses plantes durant son absence. Il maudissait Saint-Exupéry, louait Kafka, et jetait de rage les téléphones par la fenêtre depuis le troisième étage du poste de commandement.<o:p></o:p>

             Je l’aimais bien, l’adjudant.<o:p></o:p>

    Un de ces hommes de guerre à qui l’on trouve des circonstances atténuantes. Un de ces fous à qui l’on se surprend parfois à donner raison.<o:p></o:p>

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    La dernière fois que j’ai dû entendre parler de lui, c’était à la radio.<o:p></o:p>

    Un ancien militaire avait été arrêté avec tout un arsenal sur sa propriété.<o:p></o:p>

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    Moi, je serais bien allé le délivrer, l’adjudant, s’il m’avait laissé emporter mon char d’assaut, quand j’ai quitté l’armée.<o:p></o:p>

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    Au lieu de ça, je suis redevenu complètement civil.<o:p></o:p>

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    J’ai fait exactement tout ce qu’il ne supportait pas chez les civils : j’ai écouté la radio, j’ai fermé le poste, et je n’ai pas bougé.<o:p></o:p>

    J’ai juste eu une petite pensée pour lui, à l’adjudant.<o:p></o:p>

    Un peu comme ces petites prières que l’on a pour ceux qui sont presque déjà morts.

     

     

     

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