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Sur la tête du décolleteur
On n'arrête pas le progrès. Ah, si ! C’est pas des conneries ! D’ailleurs, moi, je travaille pour le gouvernement et je ne peux pas tout vous dire ce que je sais du progrès qui se trame dans votre dos, mais franchement, là, si vous lisez le journal ou que vous écoutez attentivement les informations des journaux télévisés, ceux qui ont des nouvelles terribles à vous annoncer, vous ne pouvez pas faire autrement que de reconnaître, noir sur blanc, que le progrès, c’est quelque chose de passionnant !
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Vous êtes de la fosse septique ?
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Ben tiens ! Ecoutez don’ ça, alors ! C’est une nouvelle terrible, un truc qui va révolutionner le monde ! Et le pire, c’est que vous en êtes témoins et que personne ne bouge !
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C’est au sujet de la médecine.
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Que la médecine bécote avec le progrès, ça, c’est pas une nouveauté. Mais que le progrès s’empare de la médecine comme ça …
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Ça se passe chez vous. Vous êtes tranquillou assis au fond de votre canapé. Vous regardez la météo du soleil qui fait la pluie et le beau temps, et là, paf, vous ne savez pas ce qui vous arrive, le corps vous lâche, comme on dit. Une défaillance. Si. Une défaillance technique. Un truc que si tu n’y connais rien, tu ne peux pas dire si c’est le cœur ou bien la tête. En général, si c’est une pièce osseuse, c’est facile : le chirurgien vous rabote la gangrène, il vous l’échange contre une pièce en plastique inusable et incassable, et vlan ! Remboursé par la Sécu, te v’là ti pas tout content bien droit sur les pattes arrières direction le travail !
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Normal. On n’a jamais vu mourir un gars qui peut encore travailler un peu pour les impôts, non ?
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Os cassé ? Tic : prothèse ! Artères bouchées ? Tic : une petite séance de petit ramonage savoyard ! Cœur fébrile ? Tac : une petite pile ! Un rein qui déconne ? Paf ! On t’attrape le frangin, on lui en pique un, et on te le donne à toi !
Jusque là, on ne s'étonne plus. On se banalise l’étonnement ! Pas de quoi se dévergonder la surprise, ni de s’écarquiller la stupéfaction.
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Mais à partir de maintenant, le progrès médical emploie les grands moyens. Vous allez voir !
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Je crois que les faits remontent à l’année dernière. Vous savez : un chirurgien avait réussi à greffer la main d'un corps sans vie au bout du bras d’un type qui n'avait plus de doigts.<o:p></o:p>
Personne ne s'était étonné.
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Personne n’avait donné l’impression de se turlupiner le méninge.
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On te greffe la main d'un autre au bout de ton bras et ça ne te traumatise même pas : « Tu te rends compte ? La chance de ce malade ? Bénéficier à nouveau d'une main avec tous ses doigts ? »
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Ah ouais ! Tu parles ! Si ça se trouve, cette main là a étranglé trois adolescentes, deux petites vieilles et une quinzaine d’appelés du contingent, elle a peut-être fouillé l'anus de milliers de victimes, elle a même peut-être masturbé une quarantaine d’ânes en pleine foire de l'Agriculture à Paris, mais bon, personne ne s’étonne, personne ne vomit, personne ne dit rien. Il n'y a rien de sale là-dedans.
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Alors du coup, les adeptes du corps médical, qu’ils s’appellent (tu parles, un macchabée, ouais), ceux qui aiment bien la provocation et l’évènementiel, ils nous en sortent une un peu plus violente, en espérant secrètement que ça va faire des remous et qu’ils vont accéder à la célébrité, comme Pasteur à son époque, sauf que Pasteur, c’était un mec qui voulait sauver l’humanité, et que eux … je ne suis pas certain qu’ils soient comme Pasteur !<o:p></o:p>
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L’actu dont je veux vous parler, mesdemoiselles, messieurs, les enfants, cette actu terrible du présent moderne et de la science-fiction qui fait peur à nos portes, la voilà ! Elle vous fera inévitablement réfléchir sur les dérives inévitables du Frankensteinsme médicinal, j’en suis certain !
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En effet, une expérience menée en 2001 par le professeur Robert White, sans doute blanc comme neige, a suscité quelques vives controverses dans le milieu cobayicide (c’est rien, passe ton chemin, c’est juste un endroit où l’on fait des expériences avec des cobayes et de l’acide).
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En effet, ce grand monsieur en blouse blanche, savez-vous ce qu’il nous a fait ?
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Je vous mets dans la tronche sans tambour ni trompette : il a réussi à transférer le cerveau entier d'un singe dans le corps d'un autre singe !
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Whaou ! Si, si ! Vous êtes censé faire « whaou » !
En, clair : l’un des cousins de Cheeta possède un cerveau qui est foutu. On endort Cheeta (attention, prenez des notes, ça va vous demander un peu d’attention pendant quelques instants), on lui enlève le cerveau (jusque là, tout est normal, on ne s’étonne pas), et on le rebranche dans le boîte crânienne de son cousin !
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Pour ceux qui ont compris, je continue : là, miracle ! Cheeta se réveille dans le corps de son cousin !<o:p></o:p>
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Cheeta survit ainsi quelques jours et l’heure est venue d’effectuer un petit bilan de l’expérience.
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Le cousin ? Il est mort. Sans cerveau.
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Cheeta ? Il est mort aussi. Il avait bien son cerveau, mais le fait d’être aux commandes d’un corps qui n’était pas le sien, ça l’a tué aussi.
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Donc, pour récapituler, là où un seul singe devait mourir, on en a maintenant deux, dont un, Cheeta, qui, faut-il le rappeler, est quand même le singe le plus célèbre de toute la planète Cinéma, qui est mort sans avoir rien demandé, le pauvre, avec cette sensation atroce et inhumaine, ou insingesque, si vous préférez, mais l’heure n’est pas venue de faire des jeux de mots, non, franchement, vous ne respectez vraiment rien, de se réveiller dans le corps de son cousin à qui il ne parlait plus depuis que ce dernier lui avait piqué sa guenon de femme aux poils longs.
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L’article dit : « Le singe était conscient : il pouvait voir, entendre, sentir et vivre normalement ».
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Evidemment. Ton cerveau prend les commandes d’un sboub qui n’est pas le tien pour pisser, mais jusque là, tout va bien, tu vis normalement !
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Le grand docteur, Monsieur White, donc, à qui je supprimerais immédiatement le titre honorifique, le droit d'exercer ne serait-ce que l’administration du traitement oral le plus anodin qui puisse exister, ainsi que la garde de ses gosses, explique avoir pu déconnecter le cerveau du réseau sanguin pendant une heure, sans dommage. Normalement, une perte d'alimentation en oxygène de quelques minutes suffit à provoquer des lésions irréversibles, ce qui, normalement, devrait être censé susciter en vous une réaction du genre : « Whaou ! Quel exploit ! »
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Plusieurs de ses collègues ont quand même qualifié l'expérience de « grotesque », ce qui tendrait à prouver qu'il reste un peu d'espoir à placer dans la nature humaine et le corps médical qui me semble pourtant bien malade. Car, pour la plupart des scientifiques, il est impossible de rétablir les connexions nerveuses lors de la transplantation. Sans compter les risques de rejet : déjà pour un morceau de peau, c'est délicat, alors pour un corps entier, ça relève de l’impossible !
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Mais White y croit : « Dans dix ans tout au plus, on aura fait une greffe de cerveau chez l'homme » affirme-t-il. Prix de l'opération : autour de 2 millions de dollars.<o:p></o:p>
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Grosso modo, pour résumer tout le dégoût profond qui me monte aux lèvres en écrivant ces quelques lignes, dignes du pire scénario d'anticipation de tous les temps : un mec comme Bill Gates, parce que lui, au moins, il a de quoi payer, un mec comme lui, donc, dont le cerveau est bien entendu à la source même de l'infaillibilité des systèmes qui ont fait la réputation et le succès de Microsoft, pourra être greffé dans le corps d’un autre être dépourvu de cerveau, afin de faire croire à toute la famille de ce dernier pauvre type, que Dieu existe et que les miracles ne se produisent pas seulement quand un ordinateur redémarre après un bogue intempestif.
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Merveilleux !
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Maintenant, soyons honnêtes !
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Qui, d’entre vous, ressent immédiatement l’envie de se faire posséder corps et âme par le cerveau, même non vérolé, de Bill Gates ?
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Non, parce que moi … personnellement … ça ne m’intéresse pas beaucoup !
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Un singe ou un cochon ne préfèrerait-il pas se désigner volontaire ? Loin des singeries habituelles auxquelles ce grand monsieur nous avait habitué, ce grand maître du monde, dans la peau d'un gros porc pensant mais sans parole, pourrait enfin élever la race porcine au rang de race supérieure …
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Le progrès, ce ne serait pas un peu plus approprié, si ça s’occupait un peu des animaux, au lieu de s’en servir comme cobayes gratuits pour des expériences qui filent la chair de poule ?<o:p></o:p>
Source d'inspiration : L'INTERNAUTE
Tags : greffes, progrès de la médecine, chirurgie, éthique
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Commentaires
2charliebregmanDimanche 8 Octobre 2006 à 21:58Tu ne serais pas en train de friser le blasph?, toi ?!3Lisa du 53Samedi 31 Janvier 2009 à 23:18Ce texte m'a donn?a chair de poule mais pas pour l'information qui est du pur d?re mais parce que c'est presqu'?it comme un bon roman policier dans lequel il est impossible de lacher le fil avant d'arriver ?a fin.Merci pour la comparaison avec le roman policier ! lol
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Y'a vraiment des jours o? me dis que le dieu qui ?it l'histoire de l'humanit? du Bregman dans le sang !! :-p